Vraiment, soyons francs pour un moment, on est tous hypocrite. Et pour être précis, par « nous » je veux dire nous Tunisiens, même si je crois que c’est vrai pour tout le monde mais pour nous cela prend une autre dimension.
Franchement qui de nous, n’a pas vu un comportement qu’il a critiqué sachant que lui-même a fait la même chose ou au moins a essayé de faire de même? Arrêtons de dire qu’on est parfait et que les autres ont tort. Tout le monde critique la façon de conduire des Tunisiens moi y compris, mais ne faisons pas partie de ces mauvais conducteurs ? Vraiment ? La preuve est quand un incident se passe sur la route entre deux conducteurs, les deux vont jurer que ce n’est pas leur faute et que c’est l’autre qui a tort. Les deux s’en vont raconter leur version respective de ce qui s’est passé et de la façon dont les conducteurs tunisiens se comportent sur la route. Je vous lance un défi, montrez moi du doigt un bon conducteur tunisien, juste un !!! Et ce n’est qu’un exemple, soyez honnêtes et dites moi si j’ai tort !
Comment peut-on se reformer si on ne prend pas les choses en contrôle et on n’admet pas notre défaillance en tant que membres de la même société. Pourquoi on a toujours raison et les autres ont toujours tort ? Pourquoi ? Pourquoi est ce que chaque individu pense qu’il détient la vérité et ne recule pas d’un pouce sur sa position même si parfois au fond il sait qu’il est à cours d’argument ? Pourquoi ? Et ne me dites pas que vous ne faites pas partie de nos chers compatriotes qui au cours d’une discussion préfèrent mourir avant de vous dire qu’ils ont peut être tort ou même qu’il ya du vrai dans ce que vous dites. Ok ? Au fait c’est très simple, donnez moi l’adresse d’un post ou il y a eu une discussion productive ou un des protagonistes s’est rétracté ou a fait évoluer sa pensée sur un problème. Au fait on est tous des donneurs de leçons imbus de nous même et qui avons toujours raison n’est ce pas ?
Au fait, on mérite ce qu’on a. Nos dictateurs eux sont les seuls à être moins hypocrites que nous, ils nous ont fait savoir sans nous le dire qu’ils sont la pour toujours et nous ont montré clairement ce qui nous attend si on ne se la boucle pas. On le comprend et ils savent qu’on le comprend. Mais on est plus hypocrite car je n’ai a ce jour jamais discuté avec une personne en Tunisie qui n’a pas admis que le système est pourri et corrompu et dictatorial, même les blogueurs patriotes, je vous parie qu’avec leurs amis intimes ils disent la même chose mais ils en profitent. Mais que fait-on à part en discuter à voix basse en privé ? Rien ? Même les actions populaires qui surgissent ici et la comme dans le bassin minier ou autre est le fruit de désespoir de gens qui n’ont plus rien à perdre, c’est presque vu comme un acte de suicide. On en parle, on poste des notes, on dit que ce n’est pas juste, qu’il faut faire quelque chose, bla, bla, bla.. et on passe a autres choses plus importantes comme le débat sur le rôle de la religion :-) (Putain ce que cela m’emmerde..)
Qui n’a pas discuté de la situation politique et sociale catastrophique de ce pays ? Je suis sur que tous on en parle tout les jours, mais qu’est ce qu’on fait ? Rien ? On se donne l’impression qu’on n’est pas partie prenante du problème, on se convainc qu’on ne peut rien faire, c’est la faute aux autres, aux vendus, voleurs, bla, bla, bla… Eh ben non, chers concitoyens, on est le problème et on peut être la solution si on veut. On est le problème, c’est nous qui devrons être en position de force ici, nous le peuple. Lisez un peu Abul Kacem Chabbi et vous comprendrez. N’a-t-il pas dit « Si le peuple veut vivre, le destin ne peut qu’obtempérer ».
On a mis en place ce système, et on en fait partie et on l’alimente, et le plus beau c’est qu’on s’en plaint tous les jours que dieu fait. Peut être on le fait pour nous deculpabiser car on n’est pas capable de le changer, qu’on est comme je l’ai dit ci-dessus un peuple d’individu qui doit sentir qu’il a toujours raison et qu’il ne fait jamais partie du problème, c’est les autres toujours. Comble d’hypocrisie et de fatalisme. On est les premiers à critiquer que les tunisiens vivent au dessus de leur moyens, alors qu’on l’est aussi. On est les premiers à critiquer notre société patriarcale ou la liberté n’existe pas et ou le père décide de tout et ne s’occupe de rien, ou la mère fait tout et ne reçoit rien ou l’enfant est confus par les différentes personnes qui interviennent dans sa vie et qui lui « ordonnent » de faire des choses contradictoires que eux-même ne respectent pas. Un père qui prétend aimer ses enfants mais qui passe son temps avec sa maitresse, au bar, café ou mosquée. Le devoir parental se mesure au nombre de Nikes et 501 qu’on achète a nos enfants tout en critiquant le même comportement dans d’autres familles. On passe notre temps a se chamailler, a prouver qu’on est meilleur que l’autre, qu’on a raison, qu’on a une meilleure voiture, meilleure maison, meilleure conjoint, on a la bite la plus longue, les meilleurs enfants du monde et on en est la a cause des autres.
Quand est-ce qu’on va se réveiller et se regarder en face dans un miroir et agir comme des adultes « LIBRES » et non comme des moutons. Quand est ce qu’on va comprendre que c’est nous le problème, quand est ce qu’on va apprendre à écouter et penser et non a contre-attaquer et dire n’importe quoi pour nous donner raison. La vérité, personne ne la détient, elle est cachée et il faut la trouver.
Franchement, combien a-t-on de personnes dans notre vie de tout les jours, avec qui on veut avoir une discussion ou passer un bon moment tout en se sentant bien dans sa peau et sans se soucier de sa perception ou de ce qu’il va penser de vous. Moi quand je suis en Tunisie, a part ma femme personne ne répond a ces critères…
Quand est ce qu’on va penser que la première chose a faire est d’apprendre a être libre, en parlant mais en disant ce qu’on pense et pas pour impressionner ce qui est en face de nous. On doit commencer par admettre qu’on a complètement tort, que ce n’est pas la vie qu’on veut pour nos enfants, par admettre qu’on est hypocrites, parfois menteurs, et même lâches. La on peut commencer, en se libérant de nos complexes, en nous libérant de ce que les gens pensent de nous de les que dirait-on et de cette putain de pression du groupe. Quand est ce qu’on va commencer à chercher, trouver et poursuivre le chemin du bonheur, et la vie qu’on veut vivre indépendamment de ce que les autres pensent. La on va pouvoir commencer à faire changer les choses, a avoir une discussion franche, en disant et réclamant haut et fort comment on veut vivre, la on aura une chance. Je préfère mourir heureux tout de suite qu’avoir une vie ou je passe tout mes jours à essayer de paraitre heureux. Arrêtons l’hypocrisie et agissons.
Une fois qu’on passe cet obstacle, on pourra questionner ce système qui accepte et encourage la médiocrité. En commençant par se demander pourquoi, dans ce pays seul Dieu et l’autorité suprême sont les sources de toutes les lois du pays. Nous, le peuple on ne fait que subir l’application de ces lois et on sait bien comment ces lois sont appliquées. Le parlement ? on se demande qu’est ce qui s’y passe a part passer a 100% les projets de lois et de budgets qui leur sont parachutés. No représentants ne nous représentent pas. Je me demande combien d’entre nous savent qui est leur représentant ? Même s’ils ont tous voté pour eux. Ca c’est la médiocrité.
Médiocrité qu’on trouve partout. Ca commence par la façon dont on élève nos enfants, a leur apprendre à faire partie du troupeau, on tue le curieux, le rebelle, et le courageux en eux, pire encore on ne les laisse pas avoir confiance en eux même. La médiocrité qu’on retrouve ensuite dans l’éducation, la santé, l’industrie, l’administration, l’information et même le sport. Cette médiocrité est le résultat de notre hypocrisie et notre fatalisme. Le système est médiocre car il n’a pas été discuté, il ne reflète pas notre volonté, on ne l’a jamais choisi. On en fait partie, on le critique en privé sans jamais le dénoncer publiquement. Je suis sûr que le Tunisien n’est pas différent de l’européen ou américain. La preuve est que ceux qui partent dans les quatre coins du monde et s’installent a l’étranger, réussissent généralement leur vie jusqu’au jour ou ils remettent les pieds en Tunisie. Non le tunisien n’est pas médiocre, le système l’est pour la seule raison qu’on l’a accepté.
Je m’arrête ici car je sens la moutarde me monter au nez, rien qu’en parler honnêtement fait mal. C’est peut être pour cela qu’on est tous un peu hypocrite.
Ok, je retourne dans ma coquille et reprends mon hibernation, jusqu'à la prochaine interruption :). Tiens ca rime en plus… je sais, je sais, ca ne changera rien, mais ca me soulage au moins !!
PS : J’ai écrit ce texte il ya plus de deux semaines, mais depuis, chaque jour je décide de le publier le lendemain car tel ou tel va croire que c’est une réaction a un post ou a un incident blogospherique. Preuve de ma propre hypocrisie, moi qui croyais que je me suis débarrassé de ce comportement après 20 ans de vie à l’étranger… Ben non, chassez le naturel, il revient au galop.